http://www.senat.fr/questions/base/2015/qSEQ150516160.html
Question écrite n° 16160 de Mme Marie-Françoise Perol-Dumont (sénateur de la Haute-Vienne)
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur la disparité entre la baisse des prix de plusieurs grands produits alimentaires de base et leur répercussion sur le « panier » des consommateurs.
En effet, alors même que la baisse des prix payés aux producteurs serait de l'ordre de 5 %, la diminution des coûts à la consommation ne serait que de l'ordre de 0,7 %.
Les chambres d'agriculture n'ont pas manqué de souligner le fait que « la baisse des prix agricoles n'était pas proportionnellement répercutée dans les prix que paient les consommateurs ».
Aussi lui demande-t-elle son sentiment sur cette disparité et sur les moyens envisageables pour que toute baisse en aval puisse bénéficier prioritairement aux consommateurs.
Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée dans le JO Sénat du 06/08/2015 p. 1868
L'observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires (OfPM) a mis en évidence, depuis son premier rapport, l'instabilité des marchés agricoles. Créé par la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010, il a pour objectif d'établir un dialogue régulier et constructif entre les différents maillons de la chaîne alimentaire. Ses travaux associent les différents acteurs des filières agroalimentaires. Au travers de son rapport annuel, l'observatoire livre aux acteurs de la filière, aux pouvoirs publics et au grand public une information documentée, objective et partagée sur l'évolution des prix et des marges dans les filières agroalimentaires, de la production agricole jusqu'au commerce de détail.
Après une année 2013 marquée par la poursuite de la hausse globale des prix agricoles, l'année 2014 se caractérise par une baisse relative des prix, mise en lumière par le rapport 2015, remis au Parlement le 21 avril dernier. Elle est plus marquée pour les produits agricoles (5%) que pour les produits alimentaires sortie industrie (- 1,6%) et à la consommation (- 0,7%). Ceci s'explique en partie par le fait que la création de valeur ajoutée fait diminuer la part de la matière première dans la valeur du produit, d'où une transmission amortie vers l'aval des variations de prix. Les travaux de l'OfPM montrent que la liaison entre le prix à la production et le prix à la consommation n'est pas linéaire : les différentes étapes de production et de commercialisation jouent un rôle d'amortisseur des variations de prix ; qu'elles soient à la baisse comme à la hausse. Ainsi entre 2010 et 2013, les prix agricoles ont augmenté de 20 % quand ceux à la consommation ont seulement augmenté de 6 %. La chaîne de production alimentaire et ses opérateurs économiques, de par leurs pratiques, assurent un prix de vente aux consommateurs relativement stable.
La question du prix de vente aux consommateurs revient régulièrement dans la filière alimentaire où les relations commerciales sont marquées par des tensions récurrentes entre les acteurs. La « guerre des prix » que se livrent les enseignes de la grande distribution, pour proposer les prix les plus bas aux consommateurs, met en danger l'équilibre économique des filières et ses emplois tout en diminuant leur capacité à investir dans l'outil de production. Ainsi, l'amélioration des relations entre tous les acteurs de la filière est un enjeu stratégique pour l'avenir, sur lequel le Gouvernement est pleinement mobilisé.
À ce titre, les différentes lois adoptées récemment (loi relative à la consommation de mars 2014, loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt d'octobre 2014, projet de loi dit « Macron » définitivement adopté en juillet 2015) visent notamment à garantir un meilleur équilibre dans les relations commerciales en remédiant au rapport de force déséquilibré observé entre certains partenaires commerciaux et ayant conduit à des pratiques commerciales déloyales. Elles visent aussi à favoriser un règlement à l'amiable des litiges. De plus, le Gouvernement a encadré, par arrêté du 10 juin 2015, les opérations promotionnelles pour la vente de viande porcine fraîche. La majorité des viandes fraîches de porc est vendue aujourd'hui en promotion. Or, si à certaines périodes, les opérations de promotion sont utiles pour désengorger le marché, elles sont destructrices de valeur en dehors de ces périodes. Les promotions excessives et les prix excessivement bas désorganisent le marché et l'arrêté prévoit donc qu'en dehors des périodes de début d'année et de fin d'été, les opérations promotionnelles mettant en avant des prix inférieurs à 50 % du prix moyen hors promotion du mois précédent ne pourront être réalisées.
En outre, le Gouvernement a demandé au médiateur des relations commerciales agricoles, dont le champ de compétences à été élargi en loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, de mener plusieurs médiations sur différentes filières (lait fin 2014, porc à plusieurs reprises...) afin que l'ensemble des acteurs de la chaîne alimentaire s'accorde sur des revalorisations de prix payé au producteur, ou à tout le moins, pour mettre fin à « la guerre des prix » sur certains produits entre enseignes de la grande distribution, et ce dans le but d'améliorer les relations entre les différents acteurs des filières. Enfin, le Gouvernement encourage régulièrement les acteurs à s'engager dans des réflexions sur une amélioration structurelle de leurs relations.